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Petite histoire du Marche-Avec
Ce document date des années 2000 ; il a été retrouvé par Yvon Le Borgne en août 2017.
Le nombre d’adhérents indiqué à la fin du texte n’est plus d’actualité. Actuellement, l’Association des Amis du Marche-Avec compte une centaine d’adhérents, et la ville n’utilise plus le bateau pour faire naviguer les jeunes.
La pêche à la sardine
La pêche à la sardine est traditionnellement pratiquée en Bretagne sud au moyen de chaloupes à un ou deux mâts, armées par quatre ou cinq hommes. De mai à octobre, selon les années, une impressionnante flottille (environ 600 chaloupes à Concarneau à la fin du XIXe siècle) recherche les bancs de jeunes sardines (un ou deux ans), très demandées par les usines de conserves. Cette petite sardine vorace est attirée à la surface par la rogue (des œufs de morue saumurés importés de Norvège) que le patron jette abondamment autour de son filet droit, tandis que deux rameurs maintiennent la chaloupe bout au vent au moyen de longs avirons. Les sardines se prennent par les ouïes aux mailles du filet. La légende dit qu’en mourant, la sardine pousse un petit cri.
Les cotres sardiniers
Au début du XXe siècle, plusieurs crises successives plongent les pêcheurs dans la misère. Les sardines ne sont plus au rendez-vous. Il faut aller de plus en plus loin les chercher, et revenir de plus en plus vite pour les vendre un bon prix.
L’armement de cotres sardiniers va apporter une solution pendant un temps entre 1910 et 1930. Le cotre ressemble à un petit dundee thonier. Il jauge entre 10 et 30 tonneaux, alors que le thonier jauge de 40 à 60 tonneaux.
Autre différence, le cotre sardinier ne possède pas de voile de tape-cul. La plupart des cotres sardiniers sont des « bateaux-mères » qui ne pêchent pas directement.
Ils remorquent une ou deux annexes, qu’ils envoient sur la zone de pêche. Les annexes vont ensuite prendre les sardines au filet droit, comme le faisaient les chaloupes, et remonter leurs prises à bord des cotres.
Plus rapide que les chaloupes, permettant à l’équipage de passer la nuit à bord parce qu’il est souvent ponté, le cotre représente un réel progrès par rapport aux bateaux creux.
On estime qu’un cotre a le rendement de sept à huit chaloupes, avec seulement dix hommes à bord.
Il connaît un grand succès, puisqu’on en dénombre une quarantaine à Concarneau après la Grande Guerre.
Le premier cotre sardinier construit à Concarneau semble être le Jésus-Maria (CC 1035, patron Jean Cloarec, du Passage). Il est lancé par le chantier Le Roy en mars 1912.
Mais, déjà à cette époque, plusieurs chaloupes à un mât sont gréées en cotre (ajout d’un foc et d’une trinquette à l’avant de la grand-voile) et il existe à Concarneau des cotres construits ailleurs, servant soit au bornage soit à la pêche.
En 1925, année du record de construction, 21 nouveaux cotres sardiniers sont lancés.
Plus de 70 bateaux neufs sont immatriculés à Concarneau dans la période d’apogée du cotre, entre 1923 et 1931.
Ces bateaux sont le plus souvent construits par des patrons-armateurs qui y mettent toutes leurs économies.
Pourtant, ce bateau va lui-même être rapidement détrôné. Dès 1923, le patron Crédou, du Passage, commande chez Le Roy un cotre ponté de dix tonneaux, La Bretagne, qu’il fait équiper d’un « moteur à huile » de 25 chevaux. La grande vague de la motorisation est lancée. Elle ne s’arrêtera plus.
En 1946, il ne reste qu’une quinzaine de cotres motorisés à Concarneau ; la pinasse bretonne à moteur devient le sardinier type.
C’est la fin des beaux voiliers de travail.
Le Marche-Avec
En février 1991, deux hommes discutent dans un bureau de la Chambre de commerce de Quimper. Bernard Caudan et René Hascoët sont tous deux concarnois, et déplorent que leur ville ne soit pas présente au rassemblement de Brest 92 qui se prépare sur toutes les côtes de France. « Il suffit d’être deux pour lancer une association, s’exclame Bernard Caudan, tu es partant ? » Son copain René répond « d’accord ».
En quelques semaines, c’est la mobilisation générale. La mairie donne son feu vert et verse une subvention de 150 000 F ; le chantier Piriou met ses importants moyens à la disposition de l’Association pour la construction du cotre sardinier Marche-Avec ; Hervé Andro, seul capable de diriger un tel chantier, rejoint l’équipe, de même qu’Hervé Gloux, directeur du Musée de la pêche, et Jean-Claude Guillou, premier adjoint, qui met tout son poids dans le projet. Le coût prévu est de 700 000 F.
L’équipe choisit de construire un cotre en dressant le plan à partir d’une belle photo du cotre Gaby (CC 1645, 7,60 mètres, construit en 1924 à Rosbras, patron Léon Le Cras). Après avoir hésité sur le nom, le choix est fait de le nommer Marche-Avec, du nom d’un dundee concarnois construit en 1924 au chantier de Beuzec (CC 1641, patron Joseph Crédou).
La construction est confiée au chantier Querrien du Passage. Elle se fera en public, au bas de la place Duquesne. Tout va très vite, il faut être prêt pour le début de l’année 1992. La mise sur quille donne lieu à une belle fête le 10 juin 1991, au Passage. La mise à l’eau se fait devant des milliers de personnes, à la Cale aux voleurs, le 25 novembre 1991.
Deux ans plus tard, Bernard Caudan, président de l’association, cède la barre à Jean-Claude Guillou. Au début de 1994, la Ville de Concarneau devient propriétaire du bateau selon le souhait de l’association.
Aujourd’hui, la Ville utilise le bateau pour initier les jeunes concarnois à la navigation sur un vieux gréement. L’association des Amis du Marche-Avec poursuit elle-aussi son activité.
Présidée par Philippe Guillemet dans les années 2000, elle regroupe une quarantaine d’adhérents qui travaillent à l’entretien du bateau, se retrouvent pour des sorties en mer et représentent Concarneau dans les rassemblements de vieux gréements.
(NOTA : ce dernier paragraphe n’est plus d’actualité ; voir la présentation de ce texte en haut de page)
Remerciements pour la documentation à Michel Guéguen, Jean Le Roux et Bernard Caudan.